International camerounais depuis le mois d'octobre 2024 (2 sélections face au Kenya), Martin Ndzie s'est confié à l'occasion d'un entretien accordé en exclusivité à Afrik-Foot. Encore méconnu du grand public, le milieu de terrain de 22 ans, sociétaire du FC Ashdod en Israël, a fait part de ses ambitions, aussi bien en club qu'en sélection, avec notamment la CAN 2025 en ligne de mire.
Entretien réalisé par A.P.
Comment cela se passe-t-il pour vous à Ashdod ? Quel regard portez-vous sur cette saison sur le plan collectif et individuel ?
Cette saison ne se passe pas comme on le souhaitait. Collectivement, nous ne sommes pas dans une bonne situation (avant-dernier du classement, ndlr). On va devoir batailler jusqu’à la fin pour se maintenir, c’est désormais notre objectif. Donc je suis concentré pleinement sur le maintien de mon club. Il y a des hauts et des bas. Sur le plan personnel, je ne fais pas une mauvaise saison. Je fais des bons matchs. C’est vrai qu’il y a eu des matchs un peu plus durs. Mais je me sens bien, notamment physiquement.
“Prêt pour un championnat plus relevé, comme la France”
Pouvez-vous nous donner votre avis sur le championnat d’Israël, méconnu en France ?
Pour commencer ma carrière en Europe, c’est un bon championnat. Je peux me développer ici. Ça m’ouvre les portes du football européen. Là, avec cette expérience, je me sens prêt à arriver dans un championnat plus relevé, comme en France par exemple.
Comment vous êtes-vous retrouvé à aller là-bas depuis votre Cameroun natal ?
J’ai signé par l’intermédiaire d’un agent. Ils m’ont contacté et m’ont proposé un contrat ici. J’ai un peu hésité, c’est vrai. Ce n’était pas facile comme décision, surtout pour mes parents, au regard de la situation et du contexte. Ils m’ont d’abord dit non. Mais je leur ai dit que j’étais un homme et que je voulais aller au bout de mes rêves. Aujourd’hui, grâce à cette expérience, je suis prêt à tout.

Comment vous êtes-vous adapté à Israël ? Et la vie avec le contexte géopolitique ?
Au début, c’était difficile, parce que c’était une nouvelle culture. La nourriture, ce n’était pas évident. Mais avec le temps, je me suis habitué et ça va. Je ne suis pas à plaindre. Je parle anglais majoritairement et français aussi. Sincèrement, je vis bien. Je peux vivre normalement, je peux sortir. Ici, les gens vivent tranquillement, normalement. Je peux faire mes courses tranquillement, aller au restaurant.
Dans votre équipe évolue un certain Nir Bitton, qui a explosé à Ashdod par le passé avant de rejoindre le Celtic Glasgow où il est resté très longtemps et a régulièrement joué l’Europe. Est-ce le genre de trajectoire que vous avez envie de suivre ?
C’est ça, c’est la trajectoire que j’ai envie d’avoir. M’imposer en Israël et puis arriver en Europe pour montrer mes qualités. Je sais que j’ai les qualités pour évoluer dans les grands clubs, les grands championnats d’ici deux ou trois ans en Europe.
“J’ai toujours eu comme modèle Alexandre Song”
Quels sont vos modèles ou vos références à votre poste ?
J’ai toujours eu comme modèle mon grand frère camerounais Alexandre Song, qui s’est imposé en Europe, à Arsenal et à Barcelone. J’ai toujours voulu être comme lui, imposant dans le jeu, on l’a vu notamment briller en Angleterre. À mon poste, j’ai toujours regardé des joueurs comme Thiago Motta, qui m’a beaucoup inspiré. Un numéro 6, vraiment calme, qui contrôle le jeu. Je les ai pris comme modèles.
Vos performances en Israël vous ont permis de vous faire remarquer par les Lions Indomptables et vous avez fait vos débuts en sélection à l’automne 2024. Comment est-ce que vous avez réagi lorsque vous avez appris que vous étiez sélectionné ?
Pour moi, c’était un rêve qui devenait réalité. J’étais à l’entraînement et quand je suis arrivé à la maison, j’ai reçu un coup de fil pour m’inviter à rejoindre la sélection. J’étais vraiment content, j’ai appelé mes parents, j’ai remercié le seigneur et je me suis dit que le véritable travail commençait maintenant. Qu’il fallait devenir constant, redoubler d’efforts pour continuer à être appelé régulièrement.
Comment avez-vous géré le stress lié à cette première sélection, contre le Kenya, à domicile (4-1) ? Comment avez-vous trouvé vos débuts ?
Ce n’était pas facile pour moi sincèrement. Jouer devant le public camerounais, à domicile, j’ai ressenti un peu de stress au début. Après, je me suis dit que c’était un match de football comme les autres, donc c’est rapidement passé. Jouer devant mes parents, ma famille, mes amis… Au début, dans la préparation du match, il y a eu un peu de stress mais après, ça a été. J’ai fait une bonne entrée (25 minutes de jeu, ndlr), j’ai gagné des duels, j’ai joué quelques ballons vers l’avant, je me suis trouvé bien dans mon match.
“Je les voyais tous à la télé et, là, j’étais au milieu de tous ces Lions”
Quels ont été vos rapports avec Marc Brys et son staff ?
Très positifs. Ils m’ont beaucoup encouragé pendant tout le rassemblement. Le coach Marc Brys m’a beaucoup conseillé, à l’entraînement, avec ses assistants. Ils me donnaient des conseils sur mes déplacements, sur comment gérer la pression. Ils m’ont beaucoup apprécié.
Comment votre intégration au sein du groupe s’est-elle passée ? Comment avez-vous été accueilli ? Avez-vous chanté pour votre bizutage ? Si oui, quelle chanson ?
Sincèrement, ça s’est très bien passé ! Je stressais un peu au début. Je les voyais tous à la télévision et, là, j’étais au milieu de tous ces Lions. Ils sont cools. Le groupe vit bien, tout le monde s’entend bien, c’est un bon groupe. Oui j’ai chanté pour mon bizutage, j’ai chanté l’hymne national de mon pays.

Quels sont les joueurs qui vous ont particulièrement marqué pendant cette première expérience en sélection, sur et en dehors du terrain ?
On a des leaders dans l’équipe comme Franck Zambo Anguissa, Michael Ngadeu, André Onana et Vincent Aboubakar. Ce sont des grands qui nous conseillent beaucoup. Surtout Zambo Anguissa, techniquement, c’est vraiment le très haut niveau. Il me conseillait tout le temps. Il me disait de jouer mon football, d’être à l’aise. En dehors du terrain, ils sont vraiment humains aussi. On vivait bien. Ils me conseillaient bien. Carlos Baleba, techniquement, au niveau du volume, c’est costaud aussi. Tout le monde est vraiment prêt techniquement.
“M. Eto’o est le président, alors forcément, il est présent, toujours derrière nous”
Vous n’avez pas été appelé pour les deux matches que la sélection vient de disputer contre l’Eswatini (0-0) et la Libye (3-1). Est-ce que vous avez eu un retour du staff pour vous expliquer ce choix ? Qu’avez-vous pensé de ces deux matches en tant que supporter ?
Non, je n’ai pas eu de retour. Je me suis toujours dit : « Travaille et le reste suivra ensuite ». J’ai regardé ces deux matches derrière mon écran. Il y avait du stress, on veut toujours tout gagner. Ils ont bien géré les matchs je trouve. On aurait aimé gagner le premier, mais un nul n’est pas un mauvais résultat, puis on a gagné à domicile. L’objectif est de se qualifier pour la prochaine Coupe du monde et les chances sont encore complètement ouvertes.
Vincent Aboubakar a brillé avec un doublé. Sa longévité et sa réussite impressionnent. De l’intérieur, que dégage-t-il ?
Déjà, c’est un grand homme. Ensuite, c’est un grand joueur, un grand footballeur. Il a réalisé beaucoup de choses avec la sélection, il a marqué beaucoup de buts. C’est un leader pour l’équipe. Quotidiennement, c’est un exemple, il conseille les jeunes, il porte l’équipe.

Il y a des tensions politiques entre le Ministre des Sports Narcisse Mouelle et le président de la Fédération Samuel Eto’o. Est-ce que les joueurs le ressentent sur le terrain ? Est-ce que c’est dur à vivre ?
Nous, joueurs, nous ne sommes concentrés que sur le terrain. Moi, je ne sais pas ce qui se passe en dehors du terrain. Nous ne pensons qu’au football. Ce qui se passe derrière, ce n’est pas pour nous. M. Eto’o est le président de la Fécafoot, alors forcément, il est présent, toujours derrière nous.
“Je veux participer à cette CAN”
Il y a la CAN au Maroc en fin d’année. Votre objectif, c’est évidemment d’y être. Comment jugez-vous vos chances d’y parvenir ?
Moi, je vais mettre toutes les chances de mon côté. Je sais qu’en travaillant et en ayant de bonnes statistiques, je vais participer à cette Coupe d’Afrique des Nations, c’est mon objectif aujourd’hui, je veux participer à des compétitions majeures avec mon pays. Je sais qu’avec beaucoup de travail, je vais parvenir à participer à des compétitions internationales avec la sélection.
Est-ce que cela passe forcément par un départ vers un championnat plus visible ?
C’est ce que je me dis oui. En rejoignant un championnat plus visible, où je pourrai démontrer mes qualités, je sais que j’aurai beaucoup plus de chances d’être appelé fréquemment en équipe nationale.
Quel est votre regard sur le tirage très relevé pour les Lions avec la Côte d’Ivoire, le Gabon et le Mozambique ? Comment vois-tu les chances du Cameroun dans cette compétition ?
On a tiré de grandes nations, surtout la Côte d’Ivoire, on les connaît tous, champions d’Afrique en titre. Mais nous sommes les Lions Indomptables, on y va pour gagner, pas pour être des figurants. On y va pour gagner, pour mouiller le maillot. Avec du respect, évidemment, pour le Gabon et le Mozambique aussi, de grandes nations. Mais, nous, on y va pour gagner, pour aller chercher ce trophée.