International à trois reprises avec la RD Congo et présent à la dernière CAN, Brian Bayeye se retrouve dans une situation compliquée au Torino. Placardisé, le piston droit de 24 ans a bien l’intention de rebondir à l’occasion du mercato d'hiver. En exclusivité pour Afrik-Foot, le Léopard est revenu sur sa situation et les pistes qui s’offrent à lui en France et au Portugal notamment.
Brian, comment cela se passe pour vous cette saison au Torino ?
Cette saison est un peu compliquée. J’ai signé au Torino en 2022. J’y ai fait une saison complète, puis je suis parti en prêt en 2023/24, à Ascoli (Serie B), pour avoir du temps de jeu. Je suis revenu au Toro l’été dernier. J’ai fait toute la préparation estivale, ça se passait plutôt bien. Et, une ou deux semaines avant la fin du mercato, le directeur sportif vient me voir et me dit que le club avait l’opportunité de recruter un joueur à mon poste et qu’il fallait que je parte en prêt. J’ai lui ai dit que si je trouvais un bon projet pour moi, j’étais d’accord pour partir.
“Ils m’ont mis à la cave”
Mais quelques jours plus tard, il revient me voir et me dit qu’ils ont deux clubs pour moi et que je dois absolument choisir entre ces deux écuries-là, l’une en Roumanie, l’autre en Grèce. Je n’ai pas accepté, je n’avais pas spécialement envie d’aller dans un de ces clubs et je sentais qu’on me forçait la main. Et, depuis ce jour-là, ils m’ont mis à la cave. Je ne m’entraîne plus avec le groupe. Je m’entraîne tout seul. Je ne suis plus convoqué aux matchs. Ils m’ont forcé la main pour un de ces deux clubs-là, je ne sais pas pourquoi. Mais avant d’être footballeur, je suis un homme. Je n’ai pas apprécié ce que le directeur a fait. Et depuis, je prends mon mal en patience. Je m’entraîne encore à l’écart en attendant de pouvoir partir.
Comment vivez-vous cette situation ?
C’est difficile, c’est difficile… J’ai toujours eu l’habitude de jouer et m’entraîner avec un groupe mais… C’est difficile, en plus, je ne suis pas en France, je suis à l’étranger, je suis tout seul… Mentalement, ce n’est pas facile, mais c’est le foot qui est comme ça. Cette situation arrive à plein d’autres joueurs. Je ne suis pas le premier, je ne serai pas le dernier…
Avez-vous eu une discussion avec le coach Paolo Vanoli ?
J’ai parlé avec le coach le jour où le directeur lui a annoncé qu’il ne devait plus me prendre avec le groupe. Il m’a dit que c’était un choix de la direction, qu’il n’y avait rien de personnel là-dedans, qu’il m’aimait bien humainement et en tant que joueur, mais que la direction lui avait dit de me mettre sur le côté.
Il y a d’autres Français avec vous au Toro : Yann Karamoh, Adrien Tamèze, Gnary Adopo, Ali Dembélé. Que pensent-ils de votre situation ?
Ils me soutiennent, ils savent que c’est une décision injuste. Après, dans un vestiaire, on est tous amis, mais le foot, c’est très personnel aussi, chacun s’occupe de sa carrière.
Où en êtes-vous physiquement ?
Rien ne remplace le rythme de match. Je m’entraîne avec le préparateur physique du club. Je bosse bien, il me fait des bonnes séances, j’ai de la chance sur ce point. Je suis dans les standards physiques par rapport au reste du groupe. J’ai aussi mon préparateur physique personnel, avec qui je fais des séances les week-ends étant donné que je ne joue pas. Physiquement, je suis bien. Il ne me manque que les matchs.
“Mes représentants parlent avec des clubs en France”
Vous deviez attendre le mercato avec impatience. À quoi peut-on s’attendre pour vous cet hiver ?
Je suis soulagé d’arriver au mercato. J’ai vécu six mois compliqués, mais maintenant, c’est le mercato. Ça discute un peu, j’attends qu’il y ait du concret. Je sais que le Torino va privilégier un prêt, parce que j’ai une option pour une prolongation d’un an (jusqu’en juin 2026) dans mon contrat. J’attends seulement le bon projet, le bon club pour pouvoir partir et jouer.
Quelques rumeurs circulent déjà à votre sujet, à propos d’un possible retour en France, à Troyes, votre club formateur, au Red Star et ailleurs. Est-ce que c’est quelque chose qui vous tenterait ?
Je sais que les gens qui me représentent parlent avec plusieurs clubs en France. Il y a des avancées avec plusieurs clubs. Moi, un retour en France, ça ne me dérangerait pas. Je n’ai pas évolué en France au niveau professionnel, ce serait nouveau pour moi. Pourquoi pas, tout dépend du club, du projet. Moi, ce dont j’ai besoin, c’est de rejouer. Que ce soit en France, au Portugal ou ailleurs, moi, ce que je veux, c’est jouer.
Vous parlez du Portugal. Votre nom circule également du côté d’Estoril. Est-ce un challenge qui vous plairait ?
Estoril fait partie des clubs avec lesquels mes agents discutent. Pourquoi pas. On verra durant la suite du mercato. Pour le moment, il n’y a rien de signé.
“Chancel Mbemba est dans une situation similaire à la mienne”
Ce choix est aussi très important dans l’optique de votre avenir en sélection de la RD Congo. D'ailleurs, qu’avez-vous ressenti lors de votre première CAN l’année passée, en Côte d’Ivoire, votre première compétition internationale, marquée par cette belle 4e place ? Comment avez-vous trouvé l’ambiance ? Le niveau ?
La CAN, c’était une expérience franchement incroyable. C’était top. On a fait une superbe compétition. Jouer pour sa sélection, voir son pays heureux de notre parcours, c’était vraiment quelque chose d’incroyable. J’ai pu jouer la petite finale. C’était une top expérience. L’ambiance, en Côte d’Ivoire, c’était top, ils ont organisé une CAN exceptionnelle. Tout le monde l’a vue, cette CAN-là a eu un gros buzz. C’était une super compétition. Le niveau, j’ai été vraiment surpris, tout le monde le voit, il n’y a plus de petites équipes en Afrique, tout le monde s’est vraiment professionnalisé.
Vous aviez déjà connu quelques sélections et quelques rassemblements auparavant, mais là, c’était la première fois que vous passiez autant de temps avec le groupe. Comment cela s’est-il passé pour vous ?
L’intégration a été vraiment simple. Dès que je suis arrivé, les anciens, dont le capitaine Chancel (Mbemba), sont venus me parler pour me dire comment ça se passait en sélection. Ils m’ont donné des conseils sur le terrain, à côté. L’intégration s’est faite facilement. Je connaissais déjà quelques joueurs, ça a facilité les choses. C’est un top groupe et on le voit avec les résultats actuels.
En parlant de Chancel Mbemba, avez-vous échangé avec lui, qui vit une situation comparable à la vôtre à l’Olympique de Marseille ?
On n’a pas discuté de ça. Je sais qu’il est dans une situation similaire à la mienne. Mais quand on discute, on parle de tout et de rien, de la famille, on ne parle pas forcément de nos situations communes, même si elles sont très similaires.
“Oublier toutes les petites injustices que j’ai connues ici…”
À votre palmarès figure une Coupe Gambardella, remportée avec l’ESTAC en 2018. Décrocher un titre sur la pelouse du Stade de France, vingt ans après les Bleus de 1998, qu’est-ce que ça représente ?
La Gambardella, on n’en garde que des bons souvenirs ! Avec mes coéquipiers de l’époque, on s’écrit encore chaque mois, on se parle tout le temps, ça nous a rapprochés à vie, c’était une belle expérience. Ce sont les premiers matchs sérieux, la finale au Stade de France, on était jeunes, on découvrait le monde professionnel. C’était une très très bonne expérience.
Un mot sur Bryan Mbeumo, votre ancien partenaire à Troyes, qui cartonne aujourd’hui à Brentford. Imaginiez-vous déjà une telle trajectoire pour lui ?
Bryan était déjà très fort quand on jouait ensemble en U19. Il était déjà surclassé avec la CFA (N2) et c’était déjà très très fort. Après, pour dire la vérité, je ne l’imaginais pas à ce niveau-là, en Premier League, avec autant de buts, etc. Mais c’est un bosseur et, franchement, je savais qu’il allait réussir. On s’est vu il y a cinq-six mois, on s’est croisé aussi à la CAN. Je suis franchement très content pour lui.
Pour conclure, que peut-on vous souhaiter pour 2025 Brian ?
De la santé et tout ce qui va avec ! Et sur le plan professionnel, de retrouver un bon projet qui va me permettre de rejouer, de continuer ma carrière sereinement et d’oublier toutes les petites injustices que j’ai connues ici en Italie.
Entretien réalisé par A.P.