En arrachant la troisième qualification de son histoire à la Coupe du monde le 18 novembre 2009 à Khartoum, face à l'Egypte (1-0), l’Algérie venait de renouer avec un passé footballistique glorieux. Une aventure dont la première page fut écrite en pleine guerre d’Algérie, avec la fondation de l’équipe du Front de libération nationale (FLN) en avril 1958.
En arrachant la troisième qualification de son histoire à la Coupe
du Monde le 18 novembre 2009 à Khartoum, face à la coriace Egypte
d’Abou Trika (1-0), l’Algérie venait de renouer avec un passé
footballistique glorieux. Une aventure dont la victoire historique
contre l’Allemagne de l’Ouest au Mondial de 82 à Gijón est souvent
citée comme l’apogée. Pourtant, les plus belles pages du foot
algérien furent écrites bien des années auparavant. En pleine
guerre d’Algérie.
Petit retour en arrière. Le 12 avril 1958, deux joueurs algériens, Mokhtar Arribi (Lens) et Adbelhamid Kermali (Olympique lyonnais), vont à la rencontre de la star de Saint-Etienne, qui règne à l’époque en maître sur le championnat français, Rachid Mekhloufi, à la veille d’un match contre Béziers, et lui disent : “Demain, on s’en va”. Rachid Mekhloufi ne rechigne pas. Le 14 avril, les trois compères prennent la tangente, direction la Suisse, puis l’Italie, et enfin la Tunisie, où ils doivent constituer l'équipe du Front de libération nationale (FLN). Ils seront 10 à rallier Tunis en catimini, entre le 12 et le 14 avril 1958, puis d’autres fournées suivront. En tout, une trentaine de joueurs rejoindront l’équipe du FLN pour servir de porte-voix au Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).
Français : “Réveillez-vous”
En France, la disparition simultanée et massive des joueurs algériens ne passe pas inaperçue. D’autant que l’équipe de France se prépare à la Coupe du monde qui doit se dérouler en Suède quelques semaines plus tard, et compte embarquer dans ses bagages Mustapha Zitouni et Rachid Mekhloufi. La presse de l'époque titre en grosses manchettes sur la fuite des joueurs algériens. Opération réussie pour le FLN qui voulait faire un coup médiatique pour défendre la cause de l’Indépendance. “En général, à cette époque rares étaient les gens qui savaient qu’il y avait une guerre en Algérie (…) c’était le black-out”, explique Rachid Mekhloufi dans un entretien vidéo réalisé par Génériques. C’était une action politique pour dire au peuple français : “Réveillez-vous ! Il y a une guerre qui est en train de se dérouler!” C’est un ancien footballeur, Mohamed Boumezrag (Bordeaux, Le Mans), qui a organisé la fuite des joueurs, et fondé l’équipe du FLN. Il eut l’idée de mettre sur pied cette équipe dès son retour des Jeux de l'Amitié organisés à Moscou en 1956.
Les autorités françaises font pression sur la FIFA et obtiennent l'interdiction de l'équipe du FLN, Interdiction que beaucoup de pays bravent et permettent à l’Algérie d’effectuer plus de 90 matchs, notamment dans les pays de l’Est de l’Europe et en Asie, pour faire connaître la cause algérienne. Cerise sur le gâteau, le FLN Tour a aussi permis a l’Algérie de réaliser de belles victoires, dont la plus marquante reste celle face à la Yougoslavie par 6 à 1. “Nous étions militants, nous étions révolutionnaires (…) C’était nos plus belles années”, se rappelle Mohammed Maouche, l’un des joueurs. Figure de la révolution algérienne, Ferhat Abbas eut pour sa part cette phrase à l’adresse de l’équipe du FLN : “Vous venez de faire gagner dix ans à la cause algérienne.”
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