La Premier League, nouvelle terre d’accueil des Africains

Publié le par Thomas Bartoli, actualisé le

Auparavant berceau de la plupart des grands joueurs africains, la Ligue 1 voit désormais la Premier League héberger les meilleurs talents du moment. Pourquoi ce changement ? Simple question de moyens ou mal plus profond ?


De Salif Keïta à Didier Drogba en passant par Mickaël Essien ou George Weah, le championnat de France a pendant de nombreuses années fait décoller la carrière de grands joueurs africains. Mais depuis quelques saisons, la plupart des talents de Ligue 1 sont plutôt des joueurs à vocation défensive : Enyeama (Lille), Nkoulou (OM), Abdennour (Monaco), Bayal Sall (ASSE), Gana Gueye (Lille) ou encore Bedimo (Lyon). Les joueurs offensifs venant d’Afrique se font de plus en plus rares ou simplement d’un niveau bien moindre que leurs prédécesseurs.

Baisse du niveau général

Pour un Max-Alain Gradel combien de joueurs bien plus moyens ? De plus le Stéphanois jouait en Angleterre à Leeds avant de débarquer dans le Forez. L'Angleterre, un pays qu’il a confié avoir encore dans son cœur et qui lui a permis d’avoir ces caractéristiques qui font de lui un joueur spécial en Ligue 1. Le pendant du cas André Ayew, qui est lui bien différent. Formé à l’OM le milieu de terrain vient d’être élu meilleur joueur africain de la saison en Ligue 1.

Malheureusement, dans une semaine, le Ghanéen aura quitté les pelouses hexagonales. Le fils d’Abedi Pelé (encore un grand nom révélé par la France), est un enfant de Marseille qui a voulu briller pour un maillot mis au firmament par son père et ses coéquipiers de l’époque. Avec son départ et celui programmé de Gradel qui pour leur succéder l’année prochaine ?

Sans rentrer dans des considérations “Sagnolesques”, force est de constater que le niveau moyen des joueurs africains en Ligue 1 a baissé, même si Clinton Njie et Jordan Ayew se disputent le titre officieux de meilleur attaquant africain de la saison. Si le but n’est pas de rabaisser leur talent, il est clair que ces joueurs ne font pas partie de la caste des grands talents offensifs tels que Mustapha Hadji, Didier Drogba ou encore Japhet N’Doram. Pour trouver ce genre de joueur il faut dorénavant traverser la Manche.

L’Angleterre, nouvel Eldorado

Que ce soit en Premier League ou dans les divisions inférieures, le football anglais tend à devenir le terrain de jeu préféré des joueurs du continent noir. Vitesse, vélocité, technique, intensité : voilà les ingrédients qui font de Bolasie, Zaha ou encore Sadio Mané des joueurs très en vue. L'international sénégalais, passé par Metz pendant deux ans, a quitté Saint-Symphorien lorsque le club a été relégué en National, sans jamais jouer dans l’élite. Joueur perdu par la Ligue 1 faute de pouvoir s'aligner sur les prix proposés par des formations étrangères.

L'argent, nerf de la guerre, est bien évidement une des raisons de cette avance qu’a pris l’Angleterre sur la France. Même les divisions inférieures outre-Manche peuvent s’offrir certains talents que ne peut plus retenir la France à l’image de Bakary Sako, parti en D2 anglaise après une bonne saison à Saint-Etienne. Mané, N’Doye ou encore El Mohamady auraient été également bien trop chers pour des clubs français de niveaux équivalents.

Difficile à l’heure actuelle pour la Ligue 1 de s’aligner sur les salaires anglais, c’est un fait. Que cela rentre en compte dans les choix de carrière d’un joueur en est un autre. Mais cela n’explique pas pourquoi les Africains formés en Angleterre sont désormais meilleurs que ceux qui ont fait leurs gammes en France.

Faillite de la formation “à la française” et de la France en général

Et si la baisse de niveau des Africains de France était simplement le reflet du retard pris par la fameuse formation “à la française” ? Pendant longtemps numéro un dans son genre, le système hexagonal a montré des limites depuis quelques années. La plupart des jeunes talents du moment n’ont soit pas été formés en France, soit on quitté rapidement le pays à l’image de Pogba, Griezmann ou encore Kondogbia. Benzema est le dernier symbole d’un jeune joueur offensif ayant explosé en France, même s'il est parti relativement jeune au Real Madrid.

Les centres de formation français ont pendant trop longtemps privilégié le physique à la technique. Ce qui permettait aux formateurs de gagner les championnats de jeunes sans préparer la technique pour le futur. Si l’Angleterre est un pays où peu importe la division il faut être performant sur le plan physique, les qualités de vitesse et d’explosivité sont également reines. Le Léopard Yannick Bolasie est le symbole de ce foot anglais si particulier. Le joueur de Crystal Palace, à la technique douce et à la vélocité féroce, a fait montre cette saison de qualités bien labellisées Premier League. Britt Assombalonga en Championship (D2) en est également le symbole.

Assombalonga, Bolasie ou encore Zaha viennent tous les trois d’anciennes colonies francophones (RDC, Côte d’ Ivoire). A une certaine époque, les familles venant de ces pays auraient migré vers la France. Bolasie est même né à Lyon en 1989, mais ses parents ont vite décidé de s'installer en Angleterre. Il n’y a pas que les centres de formation hexagonaux qui n’attirent plus. Le problème est peut-être bien plus profond. Le football est, sans doute, encore une fois le simple reflet des problèmes sociétaux d’un pays.

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Thomas Bartoli