Sans club après l’affaire Luzenac, Oumar N’Diaye a rebondi au MO Bejaia en janvier dernier. En Kabylie, l’international mauritanien a vécu six mois fastes marqués par une 2e place en championnat et un sacre en Coupe d’Algérie. Deux épisodes sur lesquels il revient pour Afrik-Foot, en s’exprimant également sur l’interdiction de recruter des étrangers qui frappe les clubs algériens. Actuellement libre, le milieu de terrain de 26 ans évoque aussi sa situation avec les Mourabitounes.
Oumar, que retiens-tu de tes six mois passés au MO Bejaia ?
C’est une très bonne expérience d’être venu en Algérie et d'avoir découvert un autre football et une autre culture. Concernant la réussite du club, je suis encore plus satisfait de pouvoir inscrire mon nom dans le livre du MOB. C'est la première fois qu’il réalise une telle performance, que ce soit en Coupe d’Algérie ou en championnat. C’était un honneur pour moi que de faire partie de ce groupe-là.
D'autant plus que c'est toi qui a inscrit le tir au but vainqueur contre l'ES Sétif en demi-finale de Coupe d'Algérie…
Non, en fait les commentateurs se sont trompés (rires), ils pensaient que c’était moi mais en réalité c'est le Malien Soumaila Sidibé qui avait mis le dernier penalty. Moi j’ai tiré en troisième position.
L'autre moment marquant c'est peut-être ce but inscrit contre la JS Kabylie en championnat ?
Là par contre c’était bien moi (rires). C’était très émouvant de pouvoir inscrire mon premier but, en plus dans le derby de la Kabylie, contre la JSK. J'étais encore plus heureux.
“Tout Bejaia était dehors pour nous saluer”
Les supporters du MO Bejaia n'ont, paraît-il, pas leur pareil pour mettre l'ambiance pendant les matches. Tu confirmes ?
C’est sûr qu’on est “émerveillé” par toute cette ferveur parce qu’en France (où il avait évolué jusqu'à présent, ndlr) tu ne rencontres pas forcément ça dans les stades, à part dans quelques clubs populaires comme Marseille, Lens, Saint-Etienne qui sont vraiment derrière leurs joueurs et qui les supportent du début jusqu’à la fin. En Algérie, on retrouvait ça dans tous les stades. Encore plus à Bejaia qui est réputée pour ça. Les jours de matches, on arrivait en car et déjà deux heures avant le match, des supporters étaient là à chanter, mettre l’ambiance, qu'il fasse soleil ou pas. Ils étaient entre 15 et 20 000 personnes en moyenne par match, le stade était quasiment rempli. Les supporters sont passionnés, ils vivent pour leur club. Donc, quand tu es sur le terrain, tu te dois de donner le meilleur pour leur offrir cette joie là.
Si tu devais retenir un seul souvenir de ton passage au MOB, ce serait lequel ?
La finale de Coupe d’Algérie. C’est quand même quelque chose d’énorme. Quand tu es sur le terrain, tu ne réalises pas tout de suite, tu penses au jeu, mais après, à l’extérieur, quand on est rentré d’Alger, quand on a ramené la coupe dans le bus, toute la ville de Bejaia était dehors dans les rues à nous applaudir, nous saluer, même les mamans, les enfants, les personnes plus âgées. Ça faisait vraiment chaud au cœur, je n'avais jamais vu ça.
“Cette interdiction de recrutement est bizarre”
La Fédération algérienne a récemment interdit aux clubs de recruter des joueurs étrangers à partir du prochain mercato, en invoquant un argument financier. Qu'en penses tu ?
Je ne sais pas pourquoi cette interdiction a été votée. A Bejaia, j’étais payé en dinars, comme tout le monde. C'était aux joueurs concernés d’aller dans les bureaux de change. Donc est-ce que c’est la vraie raison ? Je ne sais pas trop, j’en doute. J’ai du mal à comprendre cette interdiction. Même si je ne sais pas ce qu’il peut y avoir derrière. Je ne suis pas dans les petits papiers de la Fédération algérienne (rires).
On t'imagine défavorable à cette interdiction ?
Pour aller en Algérie, tu es obligé d’être international et d’avoir moins de 27 ans. Ce genre de joueurs augmente le niveau du championnat local. Donc, interdire leur recrutement risque de l'affaiblir. Et puis il y a deux poids, deux mesures, je ne vois pas pourquoi les joueurs sont interdits et les entraîneurs autorisés, c’est bizarre. A mon avis, on ne connaît sûrement pas le fond du problème.
“Est-ce que je regrette d'avoir résilié ? Peut-être…“
Malgré cette saison faste, tu as quitté le MOB. Pourquoi ?
J’avais signé un an et demi. Il me restait donc un an de contrat, mais j’ai décidé de résilier à l’amiable, en espérant retrouver rapidement un club en France, au moins en National. Mais à ma grande surprise, même signer un contrat fédéral en National est très compliqué parce que les clubs n’ont pas beaucoup de moyens et ils sont limités en nombre de contrats fédéraux, environ une dizaine par clubs, les autres étant des amateurs. Et je parle du National… Je n’avais pas pris conscience de ça, donc aujourd’hui je regrette peut-être d’avoir résilié le contrat à Bejaia…
As-tu des pistes ?
Les chances diminuent pour mon retour en Algérie, à cause de l'interdiction de recrutement et parce que le mercato est terminé, même si j'ai entendu dire que des présidents de clubs ont fait une demande pour le prolonger. Je ne ferme la porte à aucune opportunité. Je suis ouvert à tout projet pour relancer ma carrière, même si à choisir je préfère rester en Europe. Mais je ne suis pas fermé à un pays ou un continent. Au contraire, je suis allé en Algérie pour voir autre chose et ça m’a plu avec la réussite qu’on connaît.
“Pas en contacts avec Martins“
Un an après l'affaire Luzenac (interdit de montée en Ligue 2 par la LFP, le club ariégeois a été contraint de dissoudre son équipe première, ndlr), es-tu toujours en contact avec tes compagnons d'infortune ?
On s’envoie toujours des textos pour prendre des nouvelles. Certains ont rebondi et se retrouvent en Ligue 1 ou Ligue 2, la plupart sont en National. D’autres ont un peu moins de chance, ils galèrent et sont à toujours à la recherche d’un club. Il faut savoir que l’affaire Luzenac n’est pas terminée sur le fond parce qu’on est toujours en procédure contre la Ligue et la FFF. Rien que par rapport à ça, on se doit d’être d’en contacts, mais même sans ça, on ne se serait pas perdus de vue parce qu’on était vraiment une bande de potes.
Cela fait un an environ que tu n'es plus appelé avec la Mauritanie. Tu as discuté avec le sélectionneur Corentin Martins ?
Pas du tout. Je ne suis pas du tout en contact. Je n’ai eu aucun appel, même pendant ma période de Bejaia. Alors pourquoi ? Je ne saurai vous le dire. J’évoluais quand même dans une équipe qui était tout en haut du classement et qui a eu la chance de gagner la Coupe. Même avec toutes ces performances, je n’ai pas été appelé pour les matches amicaux ou le match contre le Cameroun en juin (0-1, lors de la 1ère journée des éliminatoires de la CAN 2017). On ne m’a pas dit pourquoi exactement. Est-ce le choix du coach ? Je ne sais pas. Est-ce celui de la Fédération ? Sûrement. Je n’ai pas eu de retour direct, ni de l’un ni de l’autre. Les échos disent que la Fédération a voulu prendre plus de joueurs locaux, mais personne ne m'a appelé pour m'expliquer. A ma grande tristesse d’ailleurs, parce que j’ai été surpris de ne pas être sélectionné au vu de mon parcours avec Bejaia ou même avant avec Luzenac.