Désiré Segbe Azankpo (31 ans), l’attaquant béninois formé au Sénégal, à Génération Foot, revient dans cet entretien exclusif accordé à Afrik-Foot.com sur son amitié avec Sadio Mané, leurs « rêves de gosses » et sur son étiquette un peu dérangeante et réductrice de “meilleur ami” de la star.
Entretien réalisé par Yoro Mangara,
On vous a un peu perdu de vue depuis votre départ de l'équipe B du Bayern Munich ?
J’évolue en D2 belge. Je joue au RFC Seraing. C’est la fin de la saison, je suis en fin de contrat. Je ne suis pas sûr de rester dans ce club, maintenant nous sommes dans le football, il ne faut jamais dire jamais. Je suis en vacances dans mon pays au Bénin, je vais essayer d’oublier le football, profiter de la famille et on verra ce qui va se passer à la rentrée.
Votre nom est souvent associé à celui de Sadio Mané. Pourquoi ?
Pourquoi ? Je ne saurais vous donner la réponse exacte. Mais je pense que c’est à cause de la gloire que Sadio a eu, parce qu’il est populaire. Sadio et moi sommes amis depuis plus de 15 ans. Avant, on ne m’associait pas à lui comme c’est le cas aujourd’hui. Aujourd’hui, Sadio est mondialement connu, c’est mon meilleur ami, et comme nous sommes tout le temps ensemble, je crois que l’idée vient de là ! S’il n’était pas connu, le problème ne se serait pas posé. Je crois que vous aussi vous avez un meilleur ami, mais je ne crois pas qu’on associe tout le temps votre nom avec votre meilleur ami. C’est comme ça, je n’y peux rien !
🚨Connu pour être très proche de Sadio Mané, l’international béninois Désiré Sègbè Azankpo commence à s’agacer de l’appellation "l’ami de Mané".
« J’ai un prénom. Vous pouvez aussi m’appeler Désiré, c’est bien aussi », a-t-il lâché. 😬 pic.twitter.com/l8nyYjCN3U
— Joueurs Béninois 🇧🇯 (@JoueursBJ) April 25, 2024
Est-ce que ce n’est pas agaçant d’être tout le temps associé à son meilleur ami ? Certains oublient même que vous êtes aussi footballeur professionnel ?
Vous savez, Sadio est mon meilleur ami et je l’assume complètement ! Je suis très heureux d’avoir un garçon comme ça comme meilleur ami. Après avoir dit ça, quand c’est récurrent, c’est chiant ! Je laisse les gens parler, je n’écoute pas, ne lis pas toutes les conneries que les gens sortent sur les réseaux sociaux et dans les journaux. Ces gens qui nous associent, ce sont des gens qui viennent de nous connaître. Les personnes qui nous connaissent depuis longtemps ne vont pas toujours nous associer. Désiré, c’est Désiré, Sadio, c’est Sadio. Chacun a sa vie. Nos carrières sont différentes.
Sadio et moi nous avons joué ensemble dans deux clubs : au FC Metz et au Bayern. Certains te diront trois, avec Génération foot à Dakar. Depuis Metz, on n’a jamais joué dans un même club. Nous nous sommes retrouvés 10 ans après au Bayern. Lui, entretemps, il a tout cassé. Pour tout vous dire, ils peuvent raconter ce qu’ils veulent, ça ne pourra pas changer l’amitié qu’il y a entre Sadio et moi.
” Parfois, Sadio m’appelle et on en rigole”
Même quand vous avez signé au Bayern, certains médias africains et européens disaient que vous étiez là grâce à Sadio, ce n’est pas vexant ?
Comme je viens de le dire, j’essaie de faire abstraction de tout cela. Chacun a le droit de dire ce qu’il veut. Vous savez très bien la presse essaie toujours de manipuler l’opinion. Sadio et moi, on en rigole. Très sincèrement, on en rigole. Parfois on tombe sur certaines choses, il m’appelle et on en rigole. J’essaie d’être très loin des réseaux sociaux. C’est pour cela, je ne lis jamais les commentaires sur les réseaux sociaux. Il me dit souvent, « laisse-les parler ». Je n’ai même pas le temps, je n’ai pas leur temps. Je travaille, et quand j’ai du temps libre, je suis avec les gens que j’aime. Nous avons lui et moi des choses plus importantes à nous dire que de commenter ce qui est dit sur les réseaux sociaux me concernant.
« Il me dit ‘petit, ils ont envoyé un jet privé pour moi, tu as entendu ? Un jet privé !' »
Pouvez-vous nous raconter une anecdote entre Sadio et vous ?
(Rires) Ah ça, j’en ai beaucoup. Celle qui me vient à l’esprit, c’est quand il devait signer en Autriche au Red Bull Salzbourg. Il m’appelle et me dit « petit », on s’appelle comme ça. Je l’appelle « petit », lui aussi m’appelle comme ça. Il m’appelle et me dit « petit, ils ont envoyé un jet privé pour moi, tu as entendu ? Un jet privé ! » Je lui réponds « comment ça un jet privé ? » Il insiste encore… « Oui un jet privé pour moi. Ils ont envoyé un jet privé pour moi ! » Je lui dis « un jet privé pour toi Sadio ? » Il me répond « oui ! juste pour moi ». Je n’y croyais pas.
Nous étions de jeunes Africains qui venions à peine de débarquer en Europe et dans le monde professionnel. C’était loin de nos réalités. Il répète encore, « un jet privé pour moi, Sadio… Un jet privé ! » Je lui dis « cours, vas-y cours, ne rate pas cette occasion ». J’étais trop content pour lui. Pour nous à l’époque, le jet privé, ce n’était pas atteignable. Pour un joueur de National, il été le troisième plus gros transfert du FC Metz. Vous vous imaginez ? Nous étions dans le bus pour aller jouer un match de National. Il est descendu du bus pour aller en Autriche, son avion l’attendait. Et à chaque fois que je me souviens de ça, je me mets à rire tout seul.
Quelles étaient vos ambitions quand vous étiez à Génération Foot à Dakar ?
Alors, nos ambitions, étaient les mêmes. Pour tout Africain talentueux, le rêve était de signer dans un grand club afin de pouvoir mettre sa famille à l’abri du besoin. Nous avions les mêmes aspirations. Je suis le tout petit dernier de ma famille. Je suis issu d’une famille modeste, et je voulais réussir pour elle. Nous avons travaillé dur pour qu’un jour nous puissions traverser la Méditerranée. Réussir dans le football fait rêver tous les jeunes Africains surtout quand on voyait les internationaux débarquer au pays pour des vacances, leurs belles voitures, etc. Ça fait rêver.
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J’avais envie de donner à mes parents ce qu’ils m’avaient donné. Mes parents bien qu’étant modestes, m’ont tout donné. Je voulais leur rendre la pareille, les mettre à l’abri du besoin. Nous rêvions d’être les futurs Drogba, les futurs Samuel Eto’o. Et ce qui était beau dans ce rêve, c'est qu'on ne savait pas jusqu’où ça allait s’arrêter. On ne se donnait pas de limites.
Rendez-vous dimanche pour la seconde partie de cet entretien, où il sera question en particulier du passage commun de Désiré Segbe Azankpo et de Sadio Mané au Bayern Munich.