Quelques heures après son départ de l’AC Paradou en Algérie, Corentin Martins a accordé un entretien exclusif à Afrik-Foot.com. L’occasion pour l’ancien sélectionneur de la Mauritanie et de la Libye de donner sa version des faits sur cette séparation “à l'amiable”. L'entraîneur français souhaite rebondir en Afrique et il répondu sans détours aux rumeurs le liant à la Tunisie et au Cameroun.
Par Yoro Mangara,
Vous avez joué en Europe, entraîné en Afrique, quelle est la différence entre ces deux footballs ?
La grande différence se trouve dans l’aspect tactique et la concentration. Sur l’aspect technique aussi, ça peut arriver sur certains postes. Si on regarde les qualités du football africain, c’est un football très gai, avec de l’engagement, avec beaucoup d’enthousiasme dans le jeu. C’est pourquoi on joue des fois plus avec le cœur qu’avec la tête, et on peut avoir des problèmes de concentration ou des problèmes tactiques.
Vous avez été sélectionneur de la Mauritanie pendant 7 ans (2014-2021), vous avez réussi à qualifier ce pays à sa première CAN, comment avez-vous fait pour construire un groupe dans un pays ou le football n’avait jamais décollé ?
Vous avez parlé de ma carrière de joueur. En Mauritanie, je n’étais plus joueur, j’étais entraîneur. Je ne marquais plus de buts. C’est les joueurs qui le faisaient, pas moi ! C’est les joueurs qui ont répondu à ce que je demandais. Je dis souvent que le coach est un guide, il doit mener les joueurs vers la victoire. Et de ce coté la, j’ai toujours été écouté, j’ai toujours eu de super groupes en Mauritanie. C’est pourquoi je suis resté 7 ans là-bas. Je me sentais très bien parmi ces joueurs.
“Je lisais la peur dans les yeux des joueurs”
La différence entre le début, quand je suis arrivé, et après, j’ai envie de dire que c’est la confiance en eux. Au début, j’arrivais à lire avant le match la peur dans les yeux des joueurs parce qu’ils avaient la sensation qu’ils allaient perdre, et au fur et à mesure, en 3, 4, 5 ans, je sentais plus d’ambition, plus d’agressivité dans leurs yeux, et plus de confiance aussi. Ils débutaient le match pour le gagner.
Donc vous n’êtes pas surpris par ce 8e de finale de la CAN qu’ils ont joué en Côte d’Ivoire ?
Non ! Les matchs sont serrés partout. Les petites équipes arrivent à rivaliser avec le cœur, avec la hargne. Quand on y ajoute un travail tactique, elles deviennent difficiles à battre.
Pourquoi aviez-vous quitté la Mauritanie ?
Tout simplement parce que, pour les qualifications à la Coupe du monde 2022, on avait fait deux défaites et nul. J’ai été limogé pour ça.
Que vous a dit le président Ahmed Yahya au moment de vous l’annoncer ?
Le président, c’est quelqu’un avec qui j’avais de très bons rapports. Il avait même du mal à l’annoncer. Mais c’est comme ça, la décision avait déjà été prise.
“Je n’avais jamais rencontré ce problème”
Après la Libye, vous avez posé vos bagages en Algérie à Paradou, comment s’est passée cette expérience en club ?
J’avais envie de me tester en club, je ne l’avais jamais fait. Je suis resté 8 mois je crois, avec un groupe jeune. La moyenne d’âge tournait autour de 23 ans. Mes attaquants, c’est 18, 19 et 20 ans. Nous avons gagné beaucoup de matchs. Nous étions 6e au classement quand je quittais le club dimanche dernier, à 2 points du troisième. Tout le monde au club est content du travail que mon staff et moi avons accompli. C’est l’essentiel !
🚨 séparation à l'amiable entre l'entraîneur français, Corentin Martins et le Paradou ac. #PAC #LGDF
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— La Gazette du Fennec (@LGDFennec) March 31, 2024
Pourquoi partir donc ? Vous avez claqué la porte ?
Je n’ai pas quitté, on m’a forcé à quitter (rires), ce n’est pas pareil. Ils ont souhaité faire venir un adjoint supplémentaire pour m’aider. Je leur ai dit que je n’en avais pas besoin. J’avais un adjoint, un entraîneur des gardiens, un préparateur physique. Je n’avais pas besoin d’une autre personne, mais les dirigeants voulaient que je le prenne, j’ai dit non. Je leur ai dit qu’il était mieux qu’on s’arrête là.
N'est-ce pas là l’une des difficultés à travailler en Afrique ?
Je ne sais pas. Moi je ne peux pas le dire, j’ai travaillé en Mauritanie et en Libye, mais je n’avais jamais rencontré ce problème. C’est arrivé à Paradou, un club particulier dirigé par des gens qui y vont avec les tripes et qui y mettent leur argent. Ils l’ont créé, le club leur appartient. C’est une décision qui a été prise, et à partir du moment ou je ne suis pas en phase avec les dirigeants, mieux vaut que chacun suive sa route.
“J'ai déposé mon CV pour le poste de sélectionneur du Cameroun”
Vous êtes de nouveau sur le marché, on vous annonce sur le banc de la Tunisie, est-ce vrai ?
Franchement, pour le moment, je ne peux pas vous répondre. Je ne peux pas vous répondre aujourd’hui. J’ai quelques sollicitations, mais je ne sais pas si ça va se concrétiser. Des places se sont libérées en Algérie pour la saison prochaine, en club je dis bien. Il y a aussi des sélections disponibles. Mais je n’ai aucune garantie aujourd’hui.
On parle avec insistance de la Tunisie ?
(Rires) Franchement je ne sais pas.
Avez-vous été en contact avec les dirigeants du football tunisien ?
Non !
Vous avez entrainé en Mauritanie, en Libye et en Algérie, c’est « l’Afrique blanche »… Êtes-vous intéressé par une nation de l’Afrique noire ?
Oui pourquoi pas ! Je ne me fixe pas de limites. Le Cameroun cherche un sélectionneur, et c’est un poste qui m’intéresse.
Avez-vous déposé votre CV à la Fecafoot ?
Oui je l’ai fait. Mais cela ne veut pas dire que j’aurai le poste. On verra ! Ce n’est pas parce qu’on a déposé un CV qu’on sera choisi.
Qu’est-ce que vous préférez : rester en Afrique ou prendre un club de Ligue 1 en France ?
Je vais vous dire, je me plais en Afrique. Il y a beaucoup de joie, et ça j’aime bien !