Blessé ces dernières semaines et pas retenu dans la liste de la Tunisie pour les matchs amicaux de juin contre le Burkina Faso (le 2 juin), le Maroc (le 7 juin) et la Zambie (le 10 juin), l’ailier Amor Layouni espère être rétabli pour disputer un rendez-vous capital avec son club du BK Häcken : la finale de la Coupe de Suède jeudi après-midi face à Malmö.
En marge de cette affiche, l’Aigle de Carthage de 32 ans s’est confié en exclusivité pour Afrik-Foot. L'occasion d'aborder son parcours atypique, le football scandinave et la sélection. Avec la CAN 2025 et le Mondial 2026 en ligne de mire.
Entretien réalisé par A.P.
Amor Layouni, comment sentez-vous cette saison pour l’équipe du BK Häcken ?
Nous avons fait quelques pas en avant cette année. Nous avons été un peu malchanceux, avec des blessures de joueurs cadres. Nous avons connu des hauts et des bas depuis le début de la saison, nous n’avons pas eu de chance sur un ou deux matches, mais je sens que nous allons être plus forts et meilleurs à partir de maintenant.
Quels sont vos objectifs à titre collectif et individuel ?
Collectivement, nous voulons accrocher une place sur le podium pour pouvoir disputer une compétition européenne la saison prochaine (après 11 journées, le BK Häcken est 8e du classement, à 10 points du podium, ndlr). Nous voulons aussi gagner la Coupe, nous sommes qualifiés pour la finale, contre Malmö (ce jeudi 29 mai). Personnellement, je veux bien jouer, marquer des buts et donner des passes décisives. Je n’ai pas de chiffre précis en tête mais je veux être décisif à chaque match.
La carrière d'Amor Layouni en bref :
2013-2016 : IK Brage (Suède)
2016-2017 : Degerfors IF (Suède)
2017 : Elverum Fotball (Norvège)
2017-2019 : FK Bodø/Glimt (Norvège)
2019-2021 : Pyramids FC (Egypte)
2021-2023 : Vålerenga (Norvège)
2023 : prêt au Western Sydney (Australie)
Depuis 2023 : BK Häcken (Norvège)
9 sélections et 1 but avec la Tunisie
Vous avez marqué 3 buts et donné 3 passes décisives en 8 matches de championnat en 2025 jusqu’à présent. Où allez-vous vous arrêter ?
Je prends juste les matchs les uns après les autres. À chaque match, je veux soit marquer, soit donner une passe décisive. Je n’ai pas de chiffre en tête comme je l’ai dit.
Excellent but d’Amor Layouni 🇹🇳 aujourd’hui au championnat de suède 🇸🇪
— helmi attia (@helmiattia) March 29, 2025
sachant qu’il a marqué les 2 buts de la rencontre …
Il mérite de jouer à l’EN lui aussi …#Tunisie #TeamTN pic.twitter.com/rpeRAMuMQU
“Nous avons une grande chance de gagner la Coupe de Suède”
Vous êtes qualifié en finale de Coupe de Suède, contre Malmö. Quel regard portez-vous sur ce rendez-vous ?
Je pense que nous serons prêts pour ce match. Le terrain est bon, ça nous convient bien. L’adversaire, Malmö, aussi. Ils aiment jouer au football, ça nous va bien. On a eu à jouer contre des blocs bas qui jouent des longs ballons directs, qui défendent à 10 et refusent le jeu. Mais quand nous jouons contre des équipes qui se livrent, qui jouent au football, nous sommes très bons, car nous savons à la fois garder la balle et piquer en contres. Ce sera un bon match contre Malmö et je pense que nous avons une grande chance de gagner.
Le football suédois n’a pas spécialement médiatisé. Nous avons vu Djugardens atteindre les demi-finales de Ligue Europa Conference. Que pouvez-vous nous dire du niveau du championnat et du football local ?
Je trouve que c’est un bon niveau. Il y a quelques très bonnes équipes et quelques équipes beaucoup moins fortes. Les meilleures équipes sont vraiment très fortes, les moins bonnes sont vraiment beaucoup plus loin. C’est un bon championnat, où on court beaucoup. C’est un peu similaire au championnat norvégien, qui a aussi des équipes qui brillent en Europe. Les gens ne connaissent pas trop, le championnat est quelque peu sous-estimé.
“Je ne me suis jamais entraîné aussi dur qu'à Bodo Glimt”
Avant de faire le succès de Häcken, vous avez pas mal voyagé. Vous avez notamment joué en Australie et en Égypte au FC Pyramids. Pouvez-vous nous raconter ces deux expériences ?
Dans chaque pays, le football est différent. Particulièrement en Égypte, où le championnat est très dur, où le jeu est très anarchique, très peu tactique. La ligue australienne était amusante à jouer, elle me convenait parfaitement, car c’est un jeu de transition porté vers l’offensive dans presque chaque équipe. Il y avait beaucoup d’espaces, alors je pouvais exploiter mes qualités. En Suède, il y a aussi beaucoup de transitions, mais c’est beaucoup plus tactique, car il y a des équipes qui ne pensent qu’à défendre, en étant bas. En Norvège, c’est très physique, avec beaucoup d’engagement, de courses et de tactique.
#Mercato : le FC Pyramids frappe fort en recrutant l'international ivoirien Wilfried Kanon et l'attaquant Amor Layouni, buteur ce mois-ci pour sa première cape avec la Tunisie ➡️https://t.co/Z5rTF5A1Ez pic.twitter.com/eb4aCTOGdc
— Afrik-Foot (@afrikfoot) September 18, 2019
Si je vous avais dit lorsque vous étiez un jeune footballeur que vous joueriez dans tous ces endroits, m’auriez-vous cru ?
Non, pas du tout. Je me suis révélé sur le tard. J’ai disputé ma première saison dans un championnat de haut niveau à l’âge de 26 ans seulement. Avant cela, je n’avais connu que des divisions inférieures.
Votre parcours vous a notamment amené à Bodo Glimt. Ces dernières années, le club norvégien s’est structuré et affiche une belle régularité au niveau européen. Comment l’expliquez-vous ? Y a-t-il un secret, une marque de fabrique Bodo ?
Le club s’assure que chaque joueur qui débarque à Bodo a la bonne mentalité. Si ce n’est pas le cas, le joueur ne jouera pas. Si tu ne t’entraînes pas dur, tu ne joueras pas. Si tu n’écoutes pas les consignes du coach et du staff, tu ne joueras pas. Ils sont comme des machines. Ils accordent une importance particulière à chaque séance d’entraînement. Je ne me suis jamais entraîné aussi dur ailleurs. Mais c’était les meilleures séances. Les entraînements étaient aussi durs que les matches, avec de l’intensité et de la qualité. Ils ont un très bon entraîneur et un très bon staff qui connaissent le football. Ils ont un système très précis, où tous les mouvements sont travaillés et étudiés, tout le monde sait ce qu’il a à faire sur le terrain, tu n’as même pas besoin de réfléchir, tu peux laisser parler ta créativité tant que tu restes dans ce cadre.
Ils peuvent miser sur des joueurs, comme moi, qui n’avaient pas exploité tout leur potentiel dans d’autres clubs et leur confier un rôle précis dans leur organisation. Et si le joueur le fait à 100%, il sera très bon. C’est ce qui s’est passé pour moi et pour beaucoup d’autres joueurs. Certains joueurs n’avaient pas de rendement ailleurs, ils venaient à Bodo et étaient ensuite revendus très cher ailleurs. Le secret, c’est la mentalité des joueurs qui signent là-bas. Ils savent exactement le type de joueurs dont ils ont besoin pour leur jeu. Et tout part de là.
Amor Layouni passeur décisif et buteur avec Hacken hier ! 🎯⚽️
— Noussour 🇹🇳 (@NoussourTN) April 21, 2025
4 G/A en 4 matchs de championnat. 💥 pic.twitter.com/inzlQ2NVA2
Avez-vous eu la possibilité, au cours de votre parcours, d’évoluer en France ?
Non, je ne crois pas. En France, on mise beaucoup sur les jeunes joueurs. Et moi, je me suis développé sur le tard. Je n’ai pas eu l’opportunité de rejoindre la France. Est-ce que j’aurais aimé y jouer ? Oui, à 100%. Je pense que le style de jeu me convient bien. J’ai vu beaucoup de matches, les rencontres sont assez ouvertes. Il n’est jamais trop tard, mais je ne rajeunis pas.
“Avec la Tunisie, nous n’avons pas de Mohamed Salah, mais…”
Parlons désormais de votre aventure avec la sélection nationale de Tunisie. Vous connaissez votre première sélection, en septembre 2019, à Radès, à 27 ans, face à la Mauritanie. Vous entrez pour la dernière demi-heure et vous inscrivez le seul et unique but de la rencontre. Racontez-nous ces débuts de rêve.
C’était fantastique ! Avoir la chance de représenter son pays, c’est un rêve. Quand je suis venu au rassemblement, que j’ai participé au premier entraînement, je me suis dit que c’était possible de le réaliser. Je me suis senti bien dans le groupe, les séances se sont bien passées. Et c’est le football ! J’ai reçu une passe parfaite et je n’avais plus qu’à marquer. C’était un incroyable moment à vivre pour moi.
Vous connaissez 3 sélections de rang à ce moment-là puis on vous perd de vue jusqu’en 2023, date de votre retour. Que s’est-il passé ?
C’est la période où je pars à Pyramids FC. J’ai eu du mal là-bas et j’ai commencé à être remplaçant, en manque de temps de jeu. Et le sélectionneur m’a dit qu’il ne pouvait pas m’appeler pour cette raison. J’ai compris. Puis je suis parti à Valerenga. Ma première saison là-bas n’était pas terrible. La deuxième saison était vraiment très bonne, mais j’étais beaucoup blessé lors de la première partie de l’année. En Australie, j’ai continué sur ma lancée et, ensuite, je suis naturellement revenu en sélection.
Vous êtes aujourd’hui un élément habituel du groupe de Sami Trabelsi.
Je veux faire partie de ce groupe évidemment. Je viens de faire les deux derniers rassemblements (entretien réalisé avant la publication de la liste de juin, ndlr). C’est bien de rendre service à ton pays en représentant la sélection et les Tunisiens. Pour ma famille, c’est aussi très important. C’est mon objectif principal maintenant d’être toujours appelé en sélection, c’est pourquoi je travaille aussi dur pour être bon dans mon club et ensuite rejoindre la sélection.
Quel regard portez-vous sur cette sélection et son potentiel ? Les individualités marquantes ?
Je trouve que c’est un très bon groupe, très fort. Nous n’avons pas forcément de joueurs stars, comme peut l’être un Mohamed Salah pour l’Égypte. Mais nous avons plusieurs cadres de haut niveau, un bon collectif, solidaire, qui travaille dur l’un pour l’autre et pour le pays. C’est important pour tout le monde de voir l’équipe gagner, alors tout le monde est à 100%. Si nous continuons comme ça, nous avons de bonnes chances.

“Ce serait un rêve de jouer la Coupe du monde”
Avec 16 points en 6 journées, les Aigles sont en bonne position dans la course à la qualification au Mondial 2026. C’est, j’imagine, votre objectif prioritaire ?
Bien sûr ! Ce serait un rêve d’être sélectionné et de jouer la Coupe du monde ! Je n’aurais jamais pu m’imaginer cela quand j’avais 24-25 ans. Alors, si ça arrive, ce serait incroyable ! Ce serait encore une nouvelle étape de franchie.
Comment jugez-vous les chances de la Tunisie à la prochaine CAN au Maroc ?
Je pense que nous avons de bonnes chances. Il n’y a aucun match facile dans une Coupe d’Afrique des Nations. Chaque match est difficile. Évidemment, l’adversaire principal sera le Nigeria, mais l’Ouganda et la Tanzanie seront aussi difficiles à battre. Nous avons de bonnes chances de nous qualifier, nous devrions nous qualifier.
Votre meilleur et votre pire souvenir en sélection ?
Mon meilleur souvenir, c’est ce but pour mes débuts. Pour le reste, je ne peux pas dire que j’ai eu un moment souvenir. Évidemment, être sur le banc, ce n’est pas drôle, mais ça fait partie du football. Je ne peux pas dire que j’ai un seul mauvais souvenir en sélection. J’ai beaucoup de bons souvenirs.
Entretien réalisé par A.P.