Qualifiée pour la CAN 2025 et la Coupe du monde 2026, la Tunisie se frotte au Brésil mardi en match amical à Lille. Avant ce choc, l’international tunisien Larry Azouni, passé l’été dernier de l’Espérance Tunis à Dibba Al-Hisn aux Emirats Arabes Unis, a fait le point sur l’état du football tunisien dans cet entretien accordé à Afrik-Foot. Le milieu de 31 ans s’est aussi remémoré ses souvenirs avec les Aigles de Carthage.
Entretien réalisé par A.P.
Larry Azouni, vous avez évolué à l’Espérance Tunis la saison dernière C’était votre deuxième expérience en Tunisie après votre passage au Club Africain. Comment jugez-vous l’évolution du football local ?
Malheureusement, le championnat tunisien est un peu laissé à l’abandon. Quand tu vois les stades, quand tu compares à l’Algérie ou au Maroc, on a malheureusement quinze ou vingt ans de retard… Et c’est triste parce qu’il y a du potentiel. Il y a de bons joueurs, de bons coaches, qui s’expatrient dans le Golfe. Il y a un manque de moyens, un manque d’organisation. Il y a beaucoup de manques. Heureusement que cela ne se reflète pas sur les performances de la sélection nationale, qui a des résultats, même si le jeu n’est pas toujours très beau à regarder. Ça ne suit vraiment pas au niveau des clubs, il y a l’Espérance et les autres…
Quel est votre regard sur la sélection justement, qui a obtenu son billet pour le Mondial 2026 ?
Toujours supporter ! Ça fait très longtemps que je ne suis plus appelé (2019, ndlr), mais j’ai des amis qui y jouent. Je suis forcément toujours derrière eux, en espérant qu’ils aillent toujours le plus loin possible, parce que ça fait très longtemps que les supporters et le pays attendent un titre. Il y a une nouvelle génération, l’effectif s’est beaucoup rajeuni. Malheureusement, je pense qu’il faudra encore du temps pour que cette équipe soit à son meilleur niveau. Mais ça passe par des matchs difficiles, comme celui de la qualification (victoire 1-0 en Guinée Equatoriale, ndlr). Il va falloir être patient mais je pense que la sélection a de beaux jours devant elle.
Comment les voyez-vous pour la CAN qui arrive en fin d’année ?
Je pense qu’une CAN qui se joue au Maroc, avec de bons terrains, pas très loin, ça peut être un plus. Moi, j’ai connu une CAN au Gabon, en 2017, et je peux vous dire que les conditions étaient difficiles. Ça peut donc être un plus pour les équipes d’Afrique du Nord. Après, la CAN, c’est une compétition compliquée, il y a toujours une ou deux équipes surprises. Mais, quand même, la Tunisie doit viser le dernier carré.
“La Tunisie ne fait pas partie des 4 favoris de la CAN”
Quels sont les favoris selon vous pour cette CAN ?
Le Maroc, le Sénégal et l’Algérie. Je pense que ces équipes ont un peu plus d’avance sur nous, par rapport à toutes les infrastructures et tout le suivi autour de l’équipe nationale qu’il n’y a pas forcément en Tunisie je trouve. Forcément, ça aide. La Tunisie ne fait pas partie des quatre favoris, mais on aime les gros matchs, on a toujours été bon contre l’Algérie par exemple, on peut être la bonne surprise je pense.
Les petits nouveaux Sebastian Bounekti, Elias Saad et Ismaël Gharbi, les connaissez-vous ? Qu’en pensez-vous ?
Ce sont de bons joueurs. Je ne les connais pas personnellement. Mais c’est bien pour l’équipe. Ça amène de la concurrence. Ça amène des joueurs différents. Un joueur comme Saad qui joue en Bundesliga tous les week-ends, il va t’amener quelque chose de différent. Ils ont aussi envie de prouver comme ils viennent d’arriver dans le groupe. C’est une bonne chose. Il faut leur laisser du temps (entretien réalisé en septembre, ndlr).
Le niveau international en Afrique, encore plus pour un joueur qui vient d’Europe, c’est compliqué. C’est un football différent. Parfois, tu joues sous 40°, à 14h, sur un synthétique. Ce n’est pas la même chose que jouer à 15h le samedi à Munich. Tout est différent. Il faut laisser un peu de temps à ces nouveaux joueurs. Mais c’est une très bonne chose qu’ils aient choisi de représenter la Tunisie.
Larry Azouni en bref
31 ans, milieu, international tunisien (10 sélections)
Carrière :
2012-2014 : Olympique de Marseille
2013-2014 : FC Lorient (prêt)
2014-2017 : Nîmes Olympique
2017-2020 : KV Courtrai
2020-2021 : CD Nacional
2021-2023 : Club Africain
2023-2024 : Al-Faisaly FC
2024-2025 : ES Tunis
2025- : Dibba Al-Hisn
“Avec la sélection tunisienne, j’ai raté le coche quand j’étais au Club Africain”
Vous comptez 10 sélections en équipe nationale. Votre dernière cape remonte à 2019. Est-ce que c’est un objectif pour vous d’y retourner ?
Sincèrement, ce n’est pas un objectif non. Après, il y a l’équipe des joueurs locaux, qui jouent dans le Golfe, l’équipe A’. Je suis réaliste : en jouant aux Émirats, en deuxième division, je pars de très loin. J’ai raté le coche quand j’étais au Club Africain. Ça faisait un an que je n’étais plus appelé, je sors d’une saison pleine au Portugal (au Nacional).
L’année de la Coupe du monde et de la Coupe Arabe (2022), je fais un super début de saison avec le Club Africain, on parle de mon retour pour la Coupe Arabe, mais d’autres joueurs sont passés devant moi. Je n’ai pas compris pourquoi, je n’ai pas trouvé cette décision très juste. Et à partir de là, je me suis un peu fait une raison sur la sélection en tant que joueur.
Quel bilan tirez-vous de votre expérience avec les Aigles de Carthage ?
Super enrichissant. J’ai commencé tôt, à 22-23 ans, j’étais encore en Ligue 2 à Nîmes. C’est Henri Kasperczak à l’époque qui m’a sélectionné et lancé le premier. Ça change ! Quand tu joues en L2 et que la semaine suivante tu te retrouves face à Mohamed Salah ou Sadio Mané, ça change ! J’ai même joué contre Xavi une fois en amical, contre la sélection de Catalogne ! Ça te permet de te confronter à des joueurs de très haut niveau.
Et sans parler football, représenter son pays, ça n’a rien à voir. Je suis très fier d’avoir porté les couleurs de la Tunisie, même s’il y a un peu de regrets, car il y a beaucoup de rassemblements où j’ai peu ou pas joué. J’aurais aimé pouvoir me montrer un peu plus. Mais bon, quand je fais le bilan, j’ai pu représenter mes deux pays : la France en équipe de jeunes et la Tunisie en A. Très fier.
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Quel est votre meilleur et votre pire souvenir en sélection ?
Malheureusement, on n’a pas gagné de titres. La CAN que je joue, on a perdu en quart de finale. Je dirai ma première sélection, parce qu’il y avait mon père, mon frère et d’autres membres de ma famille qui étaient là pour venir me voir. C’était contre le Togo, à Monastir. Je suis entré en jeu les dix dernières minutes. C’était fort en émotions.
Vous aviez disputé un Euro U19 avec l’équipe de France en 2013, avec une défaite en finale contre la Serbie. Quel souvenir gardez-vous de cette expérience ?
Franchement, c’est un très bon souvenir. À l’époque, j’étais à l’Olympique de Marseille, mais je ne joue pas en pro, je n’ai aucune minute avec l’équipe première. Je suis l’un des seuls de groupe-là qui n’a pas de contrat professionnel au moment de la compétition. Mais comme j’ai été bon à chaque fois que j’avais été appelé en sélection, le coach Francis Smerecki m’a fait confiance. Je lui ai toujours rendue sur le terrain.
Je passais devant des joueurs qui avaient des contrats pros alors que moi je jouais en réserve tous les samedis à Marseille. Très très bon souvenir malgré la défaite en finale. Il y avait Adrien Rabiot, qui était surclassé, Aymeric Laporte, Anthony Martial, Yassine Benzia, Benjamin Mendy. On avait vraiment une belle équipe.
Entretien réalisé par A.P.

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