La troisième édition de la remise du trophée de “ballon d'or africain”, a vu le sacre de Frédéric Kanouté, l’attaquant Franco-Malien de FC Séville (1re div. espagnole). Il a remporté le titre de meilleur joueur de football africain de l'année 2007, vendredi, à Lomé, devant l’ivoirien Didier Drogba, son prédécesseur au palmarès, et le Ghanéen Mickael Essien. Reportage.
Notre correspondant à Lomé
« Je suis vraiment surpris par ce prix. Je n’y croyais pas trop », a confié à afrik.com le lauréat, Frédéric Kanouté, tout ému. Et “Frédi” d’ajouter qu’il n’est « même pas venu avec un membre de sa famille pour savourer ce trophée ». L’avant-centre du FC Séville a été plébiscité par les 53 sélectionneurs des équipes nationales de football du continent africain. « Fréderic a fait une très bonne saison avec son club. Ce qui lui vaut un second succès en coupe de l'UEFA. En plus, c’est un joueur qui est intelligent et toujours effacé », nous a expliqué un technicien de la CAF qui a requis l’anonymat.
Pour d’autres, il est étonnant de constater que Didier Drogba soit surclassé par le Malien, quand on sait que l’« Eléphant » est élu meilleur africain au Ballon d'or France Football, ainsi qu'au classement FIFA, et qu’en plus, il mérite plus ce trophée cette année que l’année dernière.
Le Premier ministre togolais, Komlan Mally, a eu l’honneur de remettre le trophée au joueur, en présence du président de la CAF Issa Hayatou, ainsi que de plusieurs sommités du football au cours de cette soirée de près de 3 heures au Palais des congrès de Lomé.
Outre le trophée de meilleur joueur africain de l'année, lors de
ces CAF Awards 2007,le titre de meilleur joueur junior a été
décerné au zambien Mulenga Clifford, celui de la meilleure joueuse
à la nigériane Cynthia Uwak, et le meilleur entraineur à Yemi Tella
(équipe nationale cadet du Nigeria).
La Côte d'Ivoire a été désignée meilleure équipe nationale, tandis
que le trophée du meilleur club a été attribué à l'Etoile du Sahel
(1re div. tunisienne). D’autres joueurs à l’instar de Eto’o, Roger
Milla Cameroun), Rabba Madjer (Algerie), George Weah (Liberia),
Didier Drogba (Côte D’Ivoire), Ossam Hassan (Egypte), Abédi Pélé
(Ghana) étaient également honorés.
Les mérites de Kanouté
Agé de 30 ans, Fréderic Oumar Kanouté (1,92 m) a débarqué à Séville en 2005 où il a explosé. Il a fait ses débuts à Lyon en 1997, son club formateur, où il s'est vu cantonné au banc malgré des statistiques intéressantes (16 buts en 33 matches). Forcé de s'exiler, il est échangé en mars 2000 à West Ham avec le camerounais feu Marc-Vivien Foé. Dans une équipe moyenne où la concurrence est rude avec Paolo Di Canio, Davor Suker et Titi Camara, l’Aigle fait son trou. Malgré plusieurs blessures, il parvient à disputer 84 matches, marquant à 29 reprises en trois saisons. Lorsque les Hammers sont relégués en 2003, Kanouté signe à Tottenham. Ses débuts sont fracassants. 7 buts lors des 15 premiers matches dans une équipe en plein boom. Mais par la suite, la situation se gâte… Kanouté décide de participer en Janvier 2004 à la CAN avec le Mali, provoquant la colère des dirigeants des Spurs. Il porte le Mali en demi-finales, avec quatre buts en autant de matches et un titre de meilleur buteur.
Le retour à Tottenham, sur fond de conflit, est difficile. Et c'est logiquement que le revanchard Kanouté rejoint l'ambitieux FC Séville en août 2005. En Espagne, Frédi fait des merveilles en Liga, et surtout en coupe de l'UEFA. Le Malien plante six buts dans la compétition.
Le FC Séville de Kanouté surfe sur l'euphorie en écrasant Barcelone (3-0) en Supercoupe d'Europe pour entamer la saison 2006/2007. Mais pour cette année, le FC Séville a décidé d'aller loin. Kanouté plante tout d'abord 21 buts en 32 rencontres de championnat, le Malien se classe 3ème au classement des buteurs, tout comme son club en fin de saison. La fin de saison est tonitruante. Tout d'abord, le FC Séville bat Barcelone en finale de la Coupe UEFA et remporte la compétition pour la deuxième fois de suite. Kanouté aura encore grandement servi les siens. Le chouchou du public sévillan fera d’ailleurs des malheurs face à Getafe en marquant le seul but en finale de la Coupe du Roi avant de se faire expulser. Il réussit également à qualifier son pays pour la CAN qui se joue actuellement au Ghana.
Les CAF Awards victimes de la guerre des sponsors
Bien des observateurs ont critiqué la tenue de cette cérémonie de remise des distinctions aux footballeurs en pleine compétition de la CAN. Pire encore, le déplacement des joueurs sur Lomé. « Cette date est décalée. On est en train de vivre une compétition et on nous désigne un meilleur joueur qui ne concerne pas la compétition que nous vivons », s’indignait Joseph Antoine Bell, l’ancien goal des Lions Indomptables.
Le sélectionneur du Mali, Jean-François Jodar, n’avait pas caché sa colère contre la CAF. Un programme que le sélectionneur français avait qualifié d’ «inapproprié». Avant que le Mali ne sorte de la compétition, il avait menacé de ne pas libérer Kanouté afin d’effectuer le déplacement de Lomé. Claude Leroy, sélectionneur des Blacks Stars a également eu du mal à liberer Essien. « C’est une folie de d’organiser cette cérémonie à deux jours d’un quart de finale capital contre le Nigeria », a-t-il déploré. Seul Gérard Gili, le coach des Eléphants de Côte d’Ivoire a pu retenir Didier Drogba.
Selon nos sources, un conflit d’intérêt serait né entre Globacom (le géant des télécommunications du Nigeria et organisateur de la CAF Awards), sponsor officiel de l’équipe nationale du Nigeria et MTN (un operateur de téléphonie mobile), sponsor de la CAN 2008 au Ghana. Les propriétaires de Globacom se sont vus interdits par MTN d’imprimer leur logo (Glo) sur le maillot de leurs protégés (les Super Eagles). Une situation que les dirigeants de MTN ont trouvé « indécente » d’autant plus qu’ils sont les sponsors officiels de la compétition, et qu’en aucun cas, Globacom n’a le droit de « venir piétiner dans leur plat ». Du coup, Mike Adenuga, Président du groupe Globacom et son équipe ont préféré se rabattre sur Lomé (15 mn de vol d’Accra).
« Ce qui m’inquiète dans cette affaire : la cohabitation de deux ennemis, ou disons concurrents, au sein de la famille du football africain m’a toujours inquiétée. Je trouve que cela fait désordre et qu’il sera impératif pour la CAF de faire un choix à un moment donné », pense François Kitengué, un des responsables de ASTV (télévision sud-africaine), bien impliqué dans ce dossier. Affaire à suivre…